Le kiné libéral peut recevoir ses patients à son cabinet ou les visiter à leur domicile. Il peut aussi concilier les deux formes d’exercice de son métier. Des contraintes pèsent néanmoins sur les visites à domicile lorsque l’on s’installe en tant que jeune kiné libéral. Alors comment choisir et comment se décider en toute connaissance de cause ?
La question des soins à domicile lorsque l’on s’installe en tant que kiné libéral
Faire le choix de s’installer en libéral représente la première étape pour un masseur kinésithérapeute fraîchement diplômé. La grande majorité des étudiants privilégient cette forme d’exercice. D’autres choix seront alors à faire : s’installer seul ou rejoindre un cabinet déjà existant ? S’associer avec d’autres kinés libéraux pour la création d’un nouveau cabinet ou rejoindre une maison de santé pluriprofessionnelle ?… Mais le kiné libéral devra aussi répondre à la question des visites à domicile. Certains kinés libéraux ont décidé de ne jamais se déplacer au domicile de leurs patients et de concentrer leur activité dans leur cabinet, alors que d’autres, bien plus rares il faut l’admettre, préfèrent se déplacer. Entre le « tout à domicile » et le « toujours au cabinet », d’autres, enfin, concilient les deux pratiques. Alors pourquoi devoir faire ce choix d’accepter (ou refuser) les visites à domicile ? Quels sont les atouts et les inconvénients de visiter ses patients à domicile pour un kiné libéral ? L’activité à domicile est-elle rentable pour le kiné libéral ? Est-il possible de la rendre plus attractive et comment s’y prendre ?
Kiné libéral à domicile, quelles différences avec l’exercice en cabinet ?
Le plus souvent, les visites à domicile permettent de répondre aux attentes de patients ne pouvant plus se déplacer au cabinet du kiné libéral. C’est donc la solution pour permettre le maintien à domicile des personnes âgées (le plus souvent). Sans la visite à domicile, les patients devraient alors avoir recours à un service de transport, alourdissant la facture totale des soins. Mais le kiné libéral peut aussi exercer son métier d’une façon différente, comme nous le relations, il y a quelques semaines, avec Josselyne Buruchian, masseur kinésithérapeute visitant ses patients à domicile. Elle expliquait : « Travailler à domicile n’a rien à voir (avec le travail en cabinet de kiné). Aller chez quelqu’un, c’est pénétrer son intimité. Le relationnel est beaucoup plus fort. »
Si la visite à domicile peut être humainement enrichissante mais aussi bénéfique pour le patient (assurance de rester à son domicile…), elle représente, il ne faut pas le masquer, un investissement pour le kiné libéral. Ce dernier devra ainsi consacrer une part non négligeable de son temps dans sa voiture (ou dans les transports). Il sera alors soumis aux mêmes contraintes que d’autres professionnels de santé visitant à domicile : des patients absents lors de la visite (avec la perturbation de toute la tournée de patientèle), les aléas du terrain (embouteillage, accident…), les demandes parfois plus insistantes de la famille et des patients eux-mêmes (un petit service à rendre, le besoin de rompre la solitude…).
La visite à domicile exige donc une organisation différente pour un kiné libéral, qui ne doit plus seulement gérer un agenda mais bien prendre en compte tout ce qui fait la richesse et la difficulté des visites à domiciles.
La visite à domicile pour un kiné libéral, une activité rentable ou pas ?
Bien que la santé ne relève pas du domaine marchand, le kiné libéral va quand même s’intéresser au « modèle économique » de ces visites à domicile. Comment pourrait-il en être autrement lorsque l’aspect économique explique, en grande partie, le choix de la forme libérale pour une grande majorité des kinés ? Se déplacer au domicile des patients n’est pas qu’une question de soins mais soulève aussi des questions financières. Pour commencer, il va falloir se préoccuper du mode de locomotion, le plus souvent une voiture. Même si le kiné libéral décide de ne pas investir dans un véhicule dédié et d’utiliser son propre véhicule, cet usage a un coût, qui ne doit pas être ignoré. Les indemnités kilométriques sont souvent qualifiées d’insuffisantes par les kinés libéraux, comme par tous les autres professionnels de santé, mais dans tous les cas, le choix du domicile constitue, en la matière, une perte financière pour le kiné.
Bien souvent, le kiné libéral proposant de visiter ses patients à domicile exercera aussi une partie de son activité en cabinet, impliquant donc de devoir supporter les charges fixes de ce local professionnel. Les visites à domicile représentent donc bien une dépense supplémentaire.
Mais si le masseur kinésithérapeute peut recevoir plusieurs patients dans son cabinet de kinésithérapie, il ne pourra, par définition, s’occuper que d’un seul client lorsqu’il effectue ses visites au domicile des patients. Bien que la relation soit plus intense entre son kiné et son patient, cela se traduit par une baisse significative du nombre de patients et patientes, dont le kiné peut s’occuper.
Kiné avec ou sans visite à domicile, comment se décider ?
D’autre part, le kiné a besoin de matériel pour pouvoir prodiguer ses soins. S’il peut s’équiper de manière efficace et globale lorsqu’il exerce en cabinet, il devra trouver un équipement adapté lorsqu’il se déplace au domicile de ses patients. Les équipements les plus volumineux ne pourront donc pas être transportés au quotidien, et le matériel du kiné libéral en visite au domicile de ces patients constitue aussi une contrainte supplémentaire (achat du matériel, manutention au quotidien…).
Enfin, lorsque l’on interroge les kinés libéraux eux-mêmes, ils font état d’une autre problématique les intéressant lorsqu’il s’agit des visites à domicile. Ils évoquent en effet, comme bon nombre d’autres professionnels de santé, les problèmes de sécurité, qui sont récurrents dans certains quartiers et dans certaines villes de France. Cette insécurité reste une préoccupation majeure pour certains, pouvant même conduire certains professionnels à refuser tout déplacement à l’extérieur de leur cabinet.
On se rend bien compte des contraintes liées à l’exercice de la kinésithérapie au domicile même des patients, alors que l’exercice d’un kiné en cabinet offre bien des avantages et des atouts. On comprend mieux pourquoi si le nombre de kinés libéraux a été multiplié par deux entre 1990 et 2017, le nombre de kinés n’exerçant qu’à domicile a fondu dramatiquement. On ne connait pas les chiffres précis, mais les différentes études le démontrent.
Est-ce à dire, que les visites à domicile sont appelées à devenir une diversification pour tout cabinet de kinésithérapie libéral ? Comment s’organiser pour un kiné libéral ? Consacrer une demi-journée ou une journée chaque semaine à ces visites à domicile, supposant alors que le kiné ne pourra pas recevoir de patients dans son cabinet ? Les réponses idéales n’existent pas, et la question financière se pose alors avec plus d’importance. Lorsqu’un kiné libéral investit dans un système de balnéothérapie ou dans des locaux modernes ultra-équipés, peut-il envisager de les laisser sans usage ne serait-ce qu’une journée par semaine ? Avec le vieillissement de la population et la volonté publique de renforcer l’ambulatoire, les questions de mobilité des professionnels de santé et des kinés libéraux en particulier va se poser avec plus d’insistance. Et il faudra bien y apporter des réponses concrètes et faciles à mettre en œuvre…
Et vous, vous déplacez-vous au domicile de vos patients ? Si oui, comment vous êtes-vous organisés ? Ou alors quels freins existent-ils pour répondre aux attentes de certains de vos patients ? Quelles seraient, selon vous, les mesures à prendre pour développer ces visites à domicile pour les kinés libéraux ?
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