L’accès direct aux kinés libéraux : le besoin du soutien des médecins ?

Publié par 5 avril 2023

Depuis des mois, les diverses propositions de permettre l’accès direct aux kinés ont relancé une opposition frontale entre les médecins d’un côté et les autres professionnels de santé, dont les kinés libéraux de l’autre. Mais l’accès direct aux kinés n’a-t-il pas besoin du soutien des médecins pour pouvoir être réellement effectif ? 

 

L’ambition du gouvernement, en matière de transformation de notre système de santé, vise principalement à lutter contre la désertification médicale. Pour garantir l’égalité d’accès aux soins à toutes les Françaises et à tous les Français, le ministère de la Santé affirme depuis plusieurs années qu’une de ses priorités réside dans les actions entreprises pour libérer du temps médical. En effet, si des efforts ont été faits pour accroître le nombre de médecins formés dans les années à venir, les résultats de cette politique de formation ne se feront sentir qu’à partir de 2030.

 

En attendant, au vu de l’évolution démographique et du nombre de médecins généralistes (mais aussi du nombre de médecins généralistes se préparant à partir en retraite), il faut permettre aux médecins actuels de pouvoir prendre en charge plus de patients, sans pour autant renoncer à la qualité optimale des soins.

 

De multiples initiatives sont prises en ce sens depuis des années, et on peut ainsi évoquer la création d’un nouveau métier, les assistants médicaux, qui devaient, dans l’esprit de la réforme Ma Santé 2022, soulager les médecins dans leur quotidien. L’exercice coordonné est lui aussi fortement encouragé, et on se souvient de l’explication du président de la République, Emmanuel Macron, en 2018 :

 

« L’exercice isolé doit devenir progressivement marginal, une aberration et finalement disparaître à l’horizon de janvier 2022. »

Les masseurs-kinésithérapeutes sont-ils armés pour permettre de libérer du temps médical ? 

 

Selon une étude de la Drees de janvier 2022, cette « aberration » concernait encore près d’un médecin sur 3 (29 %). D’autres pistes, que les CPTS (Communautés professionnelles territoriales de santé), MSP (Maisons de santé pluriprofessionnelle), …, ont été évoquées pour parvenir à cet objectif (libérer du temps médical). Une de ces pistes réside dans l’interprofessionnalité et dans la possibilité accordée aux patients d’accéder directement à des professionnels de santé, dont les kinés libéraux, sans passer par la traditionnelle case de la consultation du médecin généraliste.

 

À l’automne 2022, les médecins semblaient partager cette approche. Le Comité de liaison inter Ordres (Clio) publiait même un communiqué soulignant que les différents ordres professionnels s’étaient accordés pour favoriser et renforcer cette interprofessionnalité.  Une proposition de loi était alors proposée en ce sens, avant que les médecins ne fassent volte face pour s’opposer catégoriquement à cette éventualité.  Désormais, l’Ordre des médecins ainsi que l’ensemble des syndicats médicaux défendent ardemment la place centrale du médecin traitant dans le parcours de soins des patients. Présidente de MG France, le docteur Agnès Giannotti résumait cette position en novembre 2022 :

 

On ne dit pas du tout que les autres professionnels sont moins compétents, ce n’est pas la question, mais chacun a son domaine de compétences et son cadre de travail. »

 

Cette opposition du corps médical a heurté les kinés libéraux ainsi que bien d’autres professionnels de santé. Elle met également en péril la bonne application des évolutions adoptées jusqu’ici. Car même si l’accès direct aux kinésithérapeutes est aujourd’hui officiellement reconnu par la loi (sous certaines conditions et pour certaines situations), encore fait-il l’adhésion de tous les acteurs pour que la mesure soit effective.  Les kinés libéraux ont-ils le pouvoir de convaincre les médecins de la pertinence d’une telle mesure ? C’est tout ce que l’on peut souhaiter pour les mois et les années à venir…

 

Et vous, estimez-vous que sans l’accord et le soutien des médecins, l’accès direct aux kinés risque d’être difficile à déployer ? Que faudrait-il, selon vous, pour débloquer cette situation de blocage ?

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