Sujet de discorde, pendant des mois, entre les masseurs kinésithérapeutes et les professions de santé d’une part et le Ministère de la Santé d’autre part, l’accès partiel aux professions de santé est devenu une réalité depuis le 3 novembre dernier. Les masseurs kinésithérapeutes ont décidé de réagir…
Un exercice partiel, rejeté avant même son application par les kinés libéraux
Les débats ne sont pas nouveaux, puisque l’origine de cette mesure remonte à l’année 2013 et plus précisément au 20 novembre 2013, date à laquelle est publiée la directive 2013/55/UE du Parlement Européen consacrée à la reconnaissance des qualifications professionnelles. Pour les professions réglementées, dont font partie les professionnels de santé, cette nouvelle directive européenne organisait l’accès partiel. Il faut entendre par cette dernière notion la possibilité pour un professionnel de l’Union Européenne d’exercer dans un autre pays une autre profession pour tous les actes rattachés à cette profession. Le 19 janvier 2017, une ordonnance a adapté ces nouvelles exigences aux professions de santé. L’ambition de l’Union Européenne consistait alors à faciliter et favoriser la mobilité des professionnels sur le territoire européen.
Depuis des mois, et bien avant la publication de l’ordonnance de janvier, les masseurs kinésithérapeutes et tous les professionnels de santé concernés s’étaient mobilisés, dénonçant les dangers d’une telle décision. Le Haut Conseil des Professions paramédicales (HCPP) avait même émis un long avis négatif motivé, craignant le glissement vers un système de santé à deux vitesses et un nivellement par le bas. L’Ordre des Masseurs kinésithérapeutes, comme celui des Infirmiers et bien d’autres instances nationales, ont lutté des semaines durant pour s’opposer à cette transcription d’une règle européenne dans le droit français.
L’exercice partiel, une réalité désormais incontestable pour les masseurs kinésithérapeutes
Ces contestations nauront servi à rien, puisque Mme Agnès Buzyn, Ministre des Solidarités et de la Santé, a présenté le décret en Conseil des Ministres le 02 novembre dernier, et que ce dernier a été publié le 03 novembre au Journal Officiel. L’exercice partiel pour les masseurs kinésithérapeutes comme pour les autres professions de santé est désormais une réalité dans le droit français.
L’officialisation de cette disposition na pas calmé, bien au contraire, les oppositions, et depuis quelques jours, les condamnations se multiplient. Mme Pascale Mathieu, présidente du Conseil National de l’Ordre des Masseurs Kinésithérapeutes (CNOMK) résume parfaitement le sentiment de nombreux kinés : « Avec la publication de ce décret, on ouvre la porte en grand à l’afflux en masse de professionnels formés à l’exécution d’une partie de nos actes, cet afflux va poser de nouvelles questions de démographie à l’heure où l’on voit arriver des wagons entiers de professionnels formés à l’étranger, dont bien des Français qui détournent ainsi le numerus clausus qui s’impose en France. »
Les masseurs kinésithérapeutes, prêts à réagir et à s’organiser pour défendre leur profession
Si chaque profession de santé souligne les dangers pesant spécifiquement sur leur spécialité, les masseurs kinésithérapeutes néchappent pas à la règle. Ils soulignent ainsi, que la rééducation en piscine, qui reste exclusivement prodiguée par leur soin, peut désormais être assurée par des balnéothérapeutes roumains par exemple. Il ne s’agit pas d’attaquer ou de critiquer les formations délivrées dans les autres pays de l’Union Européenne (d’autant plus que les kinés se forment de plus en plus à l’étranger) mais bien de souligner que la profession de kiné libéral ne peut pas être subdivisée en de multiples taches distinctes.
Pourtant, les masseurs kinésithérapeutes sont pleinement conscients, que la France ne pouvait pas faire autrement que d’appliquer cette directive européenne, et qu’il est déraisonnable de croire, qu’un retour en arrière est possible. Cela ne signifie pas, pour autant, que les kinés comme les autres professionnels de santé baissent les bras. Bien au contraire, la profession entend bien protéger ses missions et ainsi garantir la qualité des soins prodigués aux patients. Ainsi, Madame Pascale Mathieu explique :
« La proposition que nous faisons aujourd’hui de créer cette nouvelle profession s’appuie sur le modèle que nos voisins européens ont adopté les uns après les autres. Le technicien en physiothérapie interviendra sous la tutelle du kinésithérapeute qui aura réalisé le bilan préalable, il sera en mesure de pratiquer certains actes de rééducation conformément à la formation qu’il aura reçue. Ce schéma est le seul qui permette de mettre la France en conformité avec Bruxelles, de garantir la qualité des soins et d’être lisible par les patients. Nous avons soumis notre proposition à la ministre de la Santé Agnès Buzyn qui l’a transmise à la DGOS afin qu’elle soit étudiée. »
Créer cette nouvelle profession de technicien en physiothérapie permettrait ainsi de répondre aux obligations posées par Bruxelles, tout en assurant cette qualité des soins. On connaitra le sort, qui sera réservé à cette demande, dans les mois à venir, tout comme on connaitra l’avenir des nombreux recours engagés contre la publication de ce décret par un grand nombre d’organisations, parmi lesquelles celui de la Fédération Française des Praticiens de Santé (FFPS). Nul doute, que cet exercice partiel sera encore pendant de longues semaines au centre des débats….
Et vous, que pensez-vous de cette application de l’exercice partiel pour les kinés libéraux ? La création d’une nouvelle profession vous parait-elle de nature à aider les masseurs kinésithérapeutes à défendre les soins qu’ils prodiguent à leurs patients ?
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