S’installer comme kiné libéral en France, entre ambition et résignation

Publié par 11 juillet 2019

Si devenir kiné libéral reste une ambition majoritaire chez les étudiants en IFMKR, l’installation peut vite devenir problématique. Entre les déserts médicaux et la surpopulation annoncée des kinés libéraux en France, la question devra être tranchée par les autorités publiques dans un avenir proche. En attendant, chaque kiné libéral doit surmonter les obstacles, qui se dressent devant lui.

La démographie des kinés libéraux et hospitaliers, une quadrature du cercle difficile à résoudre

 

Les hôpitaux n’arrivent pas à recruter des masseurs kinésithérapeutes, certaines régions sont frappées par une raréfaction des kinés libéraux, les centres de thermalisme peinent à attirer les kinésithérapeutes nécessaires à leur bon fonctionnement… Les alertes sur le manque de kinés se multiplient, même s’il faut bien constater que le phénomène concerne bien d’autres professionnels de santé. Toujours est-il qu’on peut s’étonner de cette situation, d’autant plus que les autorités publiques ont une autre vision de la réalité. Ainsi, en aout 2018, une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) soulignait que la croissance du nombre de masseurs kinésithérapeutes en France serait supérieure à celle des besoins.

 

En d’autres termes, les autorités publiques se demandent si bientôt, il n’y aura pas trop de kinés alors même que la problématique des déserts médicaux fait la une de l’actualité. La situation est incompréhensible et ubuesque. Dans les chiffres, le nombre de kinés a augmenté de 61 % entre 2000 et 2016. Et la hausse devrait encore être soutenue dans les années à venir puisque les spécialistes la chiffrent à + 57 %. La France devrait donc, selon ces chiffres, compter 133.000 kinés en 2040.

Bien évidemment, cette hausse exponentielle est comparée à celle de la population dans son ensemble (+ 9 %) et l’étude souligne ainsi la distorsion de plus en plus importante entre le nombre de professionnels et le nombre de patients, en tenant compte cependant du vieillissement de la population. À en croire cette étude, la surpopulation guetterait donc la profession, alors que dans la réalité, le constat est tout autre.

Le manque de kinés libéraux, une réalité au quotidien

 

On comprend mieux l’inutilité d’une telle étude, quand on s’attache à étudier les situations locales. Alors que les kinés ne seraient pas, à en croire les autorités, une « profession tendue », les masseurs kinésithérapeutes du département de l’Aisne ont une autre lecture de la réalité. Le département est en manque chronique de kinés libéraux et hospitaliers. Pour preuve, on compte ici un kiné pour 1800 habitants, quand la moyenne nationale est de 1 pour 1200 habitants. Les délais s’allongent, et il n’est pas rare ici de devoir attendre des semaines, voire des mois pour obtenir un rendez-vous dans un cabinet de kinés libéraux.

 

Le parcours de soins des patients se dégrade, tout comme leur ressenti et la tension monte. Agacés de ne pouvoir obtenir un rendez-vous rapide auprès de leur kiné libéral, les patients passent leurs nerfs sur… les kinés eux-mêmes. Les masseurs kinésithérapeutes de l’Aisne se sont donc lancés dans une vaste campagne de communication afin d’apaiser ces relations et de calmer les patients les plus impatients, avec un slogan clair : « Notre métier ?  Vous soigner pas nous faire insulter. Stop à la violence verbale »

S’installer comme kiné libéral en France, une ambition encore attrayante ?

 

Si la situation en Picardie est symptomatique d’un quotidien difficile à gérer, elle se retrouve dans bon nombre de départements partout dans l’Hexagone, et il suffit de constater l’originalité des annonces qui fleurissent sur les réseaux sociaux pour comprendre qu’inciter un kiné libéral à s’installer dans certaines zones est devenu aujourd’hui presque une mission impossible. Est-ce à dire, que le zonage des kinés libéraux en France est dépassé, et qu’il ne répond plus aux exigences d’aujourd’hui ? Faut-il imposer aux kinés libéraux de s’installer dans certaines zones et non plus les inciter ?

 

Doit-on imposer une ou deux années d’exercice (dans une zone sous-dotée) au jeune kiné libéral avant qu’il ne se décide pour son installation définitive, comme le préconisent certains ? Faut-il renforcer encore plus les mesures d’accompagnement pour la création de maisons de santé pluridisciplinaires dans les zones désertées par les professionnels de santé ? … Il va falloir prendre une décision rapidement pour endiguer cette fracture territoriale. Dans tous les cas de figure, les décisions prises iront à l’encontre du principe de la liberté d’installation, si cher au kiné libéral comme à tout autre professionnel de santé.

 

Et vous, avez-vous une idée pour lutter contre cette situation contradictoire ? Comment apporter une réponse efficace et satisfaisante pour tous sans léser ni les patients ni les jeunes diplômés qui souhaitent s’installer en tant que kiné libéral ?

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