Les montants évoqués pour la “fraude” commise par les masseurs kinésithérapeutes sont en progression depuis plusieurs années. Ces sommes intègrent les fraudes telles qu’elles sont définies mais aussi les procédures en réclamation d’indus, souvent initiées à la suite d’une “erreur” de facturation et/ou d’interprétation. Pourtant, pour d’autres, ces fraudes pourraient aussi trouver leur origine dans la faiblesse de la rémunération des kinés libéraux.
La fraude par un kiné libéral ? De quoi parle-t-on exactement ?
Même en période de crise sanitaire, une des priorités de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie reste la lutte contre la fraude. En 2018, selon le rapport de la Rapport de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude, 123.3 millions d’euros de fraudes avaient été détectés au détriment de l’Assurance Maladie. Les masseurs kinésithérapeutes, médecins, pharmaciens, infirmiers, … étaient pointées du doigt. Pourtant, depuis 2014, les autorités sanitaires ont adopté un “détecteur de profils atypiques” devant permettre de cibler plus efficacement les contrôles et d’identifier plus rapidement les “fraudes” éventuelles de la part de ces professionnels de santé.
Pourtant, les autorités sanitaires reconnaissent implicitement, qu’il ne s’agit pas exclusivement de fraudes, puisque celles-ci sont définies comme “des faits illicites au regard des textes juridiques, commis intentionnellement (…)“. Or, qu’il s’agisse des kinés libéraux ou de tout autre professionnel de santé, ces fraudes résultent plutôt d’une pratique jugée non conforme par rapport au Code de la Santé Publique. Par exemple, la facturation par le kiné libéral de séances supplémentaires par rapport aux référentiels ne sera détectée que lors d’un contrôle d’activité. Il ne s’agit pas d’une fraude à proprement parler, puisque ce n’est ni intentionnel, ni illicite mais bien contraire à un cadre défini par les autorités sanitaires eux-mêmes (Les référentiels de la CNAMTS sur les seuils déclencheurs de l’entente préalable constituent ce cadre, validé par la Haute Autorité de Santé).
Les contrôles des kinés libéraux, des procédures en réclamation d’indus
Dans sa Charte du contrôle de l’activité des professionnels de Santé par l’Assurance Maladie, cette dernière distingue le contrôle d’activités du contrôle médical. En revanche, dans les deux cas, les sources de déclenchement de ces procédures sont identiques à savoir :
- Programme thématique décidé par l’Assurance maladie
- Identification d’anomalies ou de données atypiques (algorithme détecteur évoqué ci-dessus)
- Témoignage ou signalement d’un tiers
Et lorsque ce contrôle est effectué dans le cadre d’une procédure en réclamation d’indus, c’est alors le délai de prescription de 3 ans, fixé par le Code de la Sécurité Sociale, qui est applicable. Dans la mesure où ces “fraudes involontaires” proviennent d’une erreur voire d’une incompréhension des règles de facturations, il est très fréquent qu’elles soient récurrentes dans l’activité du cabinet de kiné contrôlé. Les montants des indus peuvent parfois atteindre des sommes conséquentes, et le stress ressenti par le kiné libéral mis en cause vite devenir insupportable.
Des dérives dues à la faiblesse de la rémunération des kinés libéraux ?
Si l’Assurance Maladie définit donc la fraude, elle distingue également les :
- Les activités abusives
- Les activités fautives : L’intention de frauder n’est pas reconnue, même si elles se définissent le plus souvent par le caractère “réitérée des faits irréguliers au regard de textes juridiques“
Il n’existe pas d’études détaillées distinguant les différentes catégories de fraudes constatées pour ce qui concerne les masseurs kinésithérapeutes. Cependant, l’étude des données recueillies souligne que les activités fautives sont prépondérantes par rapport aux véritables fraudes, qui restent marginales. A l’Assemblée Nationale, le 22 juillet 2020, le secrétaire général du Conseil National de l’Ordre des masseurs Kinésithérapeutes, M. Jean-François Dumas s’exprimait devant commission d’enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales : “La pratique de la kinésithérapie a pour spécificité la très faible rémunération des actes les plus fréquemment pratiqués dans un cabinet – elle est de 16,13 euros. Considérant que le taux de charges est de 50 %, les revenus dégagés sont des plus limités. Cela nous incite à penser que l’augmentation des fraudes malheureusement constatée est pour partie liée à l’extrême faiblesse de cette rémunération“.
Et vous, comment expliquez-vous l’augmentation de la fraude, comme l’a souligné M Dumas ? La rémunération des actes des masseurs kinésithérapeutes peut-elle à vos yeux expliquer une partie de ces fraudes constatées ?
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